#6 SEMER : R - Réussir
Temps de lecture : env 11 min
Coucou les agris 😀
Nous voilà déjà embarqués pour la dernière semaine du mois de juin. Ce mois toujours bien chargé tant dans les champs que dans la vie perso, surtout si vous avez des enfants (coucou les kermesses et autres spectacles de fin d’année, goûter et fêtes d’anniversaires, (ré)inscriptions diverses et variées et le lot de paperasses associées à remplir toujours les mêmes infos…).
Et pour couronner le tout, il fait chaud, très chaud même. Et sec, trop sec. Ici, il n’a pas plu depuis des semaines déjà. Les semis de printemps tardifs en ont souffert, et les cultures levées sont à la peine aussi. Les cultures d’hiver arrivent en fin de cycle et les moissons ont déjà commencé pour l’orge et même le colza.
Chez nous les foins sont terminés il y a même eu des 2èmes coupes dans les prairies temporaires et notamment la luzerne. La batteuse est prête et fera sa première sortie aujourd’hui même !!
Et chez vous, ça s’annonce comment ?
Avant de commencer, si tu n’es pas encore abonné, c’est par ici :
Aujourd’hui, ce sera la dernière newsletter sur ma série d’exploration de la méthode SEMER que je t’ai présentée lors des éditions #1 , #2 Se recentrer, #3 Évaluer, #4 Mesurer et #5 Engager (tu peux aller y jeter un œil si tu ne les as pas encore lues !), avec le 1er “R” de SEMER : RÉUSSIR.
🤓 Parti pris : Notre avenir dépend-il de la technique ? Ma vision du sujet du bac philo appliqué à l'agriculture
Je pense qu'on est nombreux chaque année à guetter les sujets du bac philo, par curiosité et sans pression quand on n'a pas à plancher 4h avec un bac à la clé (ou que nos enfants ne sont pas encore concernés 😬).
Cette année, j'ai été plutôt inspirée par le 1er sujet du bac tombé la semaine dernière : "Notre avenir dépend-il de la technique ?", alors j'ai eu envie de te faire part du plan que j'aurais réalisé si j'avais dû passer l'épreuve, avec un clin d’œil à l'agriculture. Sans prétention aucune bien sûr (oserai-je avouer que j'ai eu 6/20 au bac philo ? 😭)
La technique a été notre passé avant d'être notre avenir. Elle a guidé l'évolution de nos sociétés depuis la préhistoire avec les premières pierres taillées il y a plus de 2 millions d'années, puis la maîtrise du feu, l'apparition de l'agriculture il y a plus de 10 000 ans, et de l'écriture.
La vie des Hommes à notre époque contemporaine a également évolué au gré des découvertes techniques, notamment avec les révolutions industrielles à partir de la fin du 18ème siècle, qui ont ouvert la voie au monde que l'on connaît aujourd'hui.
Un monde où nous pouvons acheter des milliards de produits manufacturés, produits aux 4 coins du monde.
Un monde où nous n'imaginons plus vivre une journée sans wifi ni smartphone.
Un monde où l'intelligence artificielle semble ne plus pouvoir s'arrêter.
Un monde où nous nous nourrissons essentiellement d'aliments transformés, bien loin des champs et de la production agricole.
Un monde où le bonheur semble être à portée de clic.
Pourtant, ce même monde n'a jamais été aussi malade.
La pauvreté, les inégalités, existent toujours partout dans le monde.
Le réchauffement climatique s'emballe et semble inarrêtable.
Les pollutions perturbent les écosystèmes.
Les conflits se développent encore et toujours.
Les humains n'ont jamais été autant déconnectés de la nature et aussi seuls, à l'ère de l'omniprésence des réseaux sociaux.
Les troubles mentaux s'accroissent.
Nous jetons ou gaspillons 30% de la production alimentaire, et poursuivons dans le même temps la course à la productivité à tout prix.
Les enfants ne reconnaissent plus les légumes, ne savent pas d'où vient le jambon, et que la purée est réalisée à partir de pommes de terre.
La technique qui nous a apporté tant de confort de vie, de sécurité notamment alimentaire, ne nous aurait-elle pas dépassés ?
Ou plutôt, l'Homme ne se serait-il pas fourvoyé, en donnant les clés de l'humanité à la technique ?
Notre avenir dépendra avant tout de notre capacité à remettre la nature et l'Homme au cœur de notre système.
Tout comme l'avenir de l'agriculture dépendra de notre capacité à remettre la T(t)erre et les Hommes au cœur de son système.
La technique sera toujours utile, mais pas pilote. Elle sera un moyen, pas une fin.
⁉️ Et toi, tu as été inspiré par les sujets de philo, et celui-ci en particulier ?
📖 Le dossier de la semaine : R - RÉUSSIR
C’est une étape souvent négligée voire carrément zappée malheureusement.
Hors, sans cette dernière étape, tous ce travail effectué précédemment n’est pas pleinement valorisé. Et surtout, il ne pourra pas te servir pour prendre des décisions quand tu en auras besoin !
Une exploitation, une entreprise, n’est pas statique, elle vit, elle évolue, au gré de multiples facteurs !
🤔 Le prix du blé baisse ? Quel impact sur ma trésorerie si je vends maintenant ?
🤔 J’ai une grosse panne matériel qui va me coûter 5000€ : vais-je être à découvert ?
🤔 Un de mes propriétaires souhaite mettre en vente des terres que je louais : quelle charge supplémentaire cela représente et est-ce que ça passe ?
Autant de questions du quotidien, auxquelles vous pourrez répondre facilement et de manière éclairée grâce aux outils qui nous t’ont permis de mesurer et projeter l’évolution de la trésorerie, du résultat, et des annuités notamment.
Comment suivre et mettre à jour ses outils de pilotage ?
👉 1- Le prévisionnel mensuel de trésorerie
Pour mémoire, c’est l’outil qui te permet de prévoir, en début de campagne, l’évolution de ta trésorerie mois par mois. Rappelle-toi, c’est celui-là, en version graphique :
En début de campagne, tu t’es basé sur
des données plus ou moins prévisibles de manière juste : des stocks avec des prix de vente liés au marché du moment ou à des moyennes pour le chiffre d’affaires, la même base que l’année précédente pour les aides PAC, des moyennes des années précédentes pour les charges opérationnelles et de structure,
des annuités (ou échéances de crédit-bail) à rembourser de manière bien certaine,
des prélèvements privés “objectif”.
Hors au fur et à mesure qu’elle avance, certaines données s’affinent, des imprévus adviennent, les marchés évoluent.
Tu peux donc suivre ton prévisionnel simplement de 3 manières, qui peuvent se cumuler :
Tu inscris le vrai solde cumulé sur ton fichier Excel ou ton outil de pilotage, qui correspond tout simplement au solde de ton compte bancaire pro le 30 de chaque mois, consultable en ligne. Tu peux déjà comparer et voir si tu es au-dessus ou au-dessous, et essayer d’en tirer des conclusions. S’il y a des variations, cela peut être lié à des décalages de paiements ou d’encaissements, mais aussi à des charges en plus ou des produits en moins… Dans ce dernier cas, il est important d’en analyser les causes pour anticiper des choses si besoin !
Tu peux aussi, et c’est même mieux, créer une nouvelle ligne en-dessous de celle du solde cumulé “théorique”, qui correspond au solde réel (solde du compte eu 30 du mois), et rajouter une nouvelle courbe de graphique : ce sera ainsi plus parlant visuellement puisqe tu pourras comparer les dynamiques du prévi et du réalisé !
Tu peux ajuster les produits et charges prévus les mois suivants si tu as connaissance de nouveaux éléments. Par exemple, si tu as vendu des céréales avec un prix ferme et une échéance fixe, ou si tu sais que tu vas avoir une panne de matériel à payer le mois prochaion qui n’était pas prévue, ou encore si les prix de marché ont évolué.
Ainsi, tu pourras te réjouir et anticiper des décisions futures (placements, investissements, prélèvements…) si la trésorerie est plus favorable que prévu. Et aussi anticiper d’éventuels besoins si toutefois le réel est en dessous du prévisionnel. Et comme tu le sais, on est toujours plus fort et les solutions sont souvent bien plus adaptées et moins onéreuses lorsqu’on anticipe !
Aussi, un constat que j’ai souvent fait : quand on a fait un prévisionnel comme celui-ci, on s’y réfère lorsqu’on souhaite acheter des choses : du petit matériel, des fournitures, et mêmes des charges courantes commen des intrants. Et ça fait réfléchir !! Si on est plus élevé ou au(dessus du prévisionnel, on se questionne, on réfléchit bien plus que si l’on n’a pas de ligne directrice !
👉 2- Le prévisionnel de résultat
Si tu te rappelles bien, c’est l’outil qui permet deprojeter le résultat de la campagne à venir, ou juste passée.
Et ça ressemblait à ça, par exemple :
Ici, un peu comme le prévisionnel de trésorerie, on peut adapter, chaque mois ou même chaque trimestre, les grands volumes de recettes et de dépenses. Et ainsi voir comment évolue le résultat.
Comme on est plus en grandes masses que sur le prévisionnel de trésorerie, tu vas pouvoir avoir 3 types d’usages :
Anticiper, en cas de résultats supéreurs à la prévision ou importants, des décisions pour lisser ou limiter la fiscalité. Certaines d’entre elles doivent être prises avant la fin de l’année civile (versement sur un PER ou épargne salariale par ex), la fin de l’exercice comptable (crédit-bail par ex) ou peu de temps après la clôture de l’exercice comptable (versement DEP par ex) pour être prises en compte. Autant de cas où il sera trop tard si tu attends la remise de ta compta !
Valider, en cas de résultats inférieurs à la prévision, des besoins éventuels déjà détectés avec le prévisionnel de trésrerie, en grandes masses,
Fournir des données claires et à jour en cas de projet, à ton banquier notamment, alors que la compta n’est pas clôturée ou éditée : si tu fais ça, je t’assure d’expérience que tu pars avec beaucup de points d’avance !!
👉 3- L’évolution pluriannuelle du triptyque EBE/annuités/prélèvements privés
Celui-là, c’est peut-être le moins évident, rappelle-toi c’était celui qui te perme de rasinner ton équation entre les annuités, les prélèvements privés, et la marge de sécurité.
Celui-là bougera moins que les 2 précédents, car ici, on travaille en prévision pluriannuelle.
Mais il te sera indispensable en cas de nouveau projet d’investissement : tu vas pouvoir tester des modalités avec des calculs d’annuités et de dates d’échéance, pour voir si “ça passe” ou non.
Ce tableau-là, c’est celui que renseigne ton banquier quand tu le sollicites pour un avis bancaire. Si tu te présentes de manière assurée avec un tableau comme celui-ci et en t’étant assurée que tu respectais la marge de sécurité de 15%, tu assures une bonne partie de ta réussite !
En complément d’autres bonnes pratiques dont je t’ai déjà parlé dans cette newsletter : Les bons tuyaux : comment bien préparer son rdv à la banque ?
Alors, est-ce que tu imaginais l’importance de suivre tes outils de pilotage au fil de la campagne ?
📰Les actus de la semaine
"Ce qui était exceptionnel devient la norme. On l'a dit souvent. C'est maintenant réalité.”
Ce sont les paroles aujourd’hui de l’agrométérologue Serge ZAKA. Oui, encore lui, mais malheureusement les épisodes de sécheresse et chaleur intenses que nous vivons depuis plusieurs jours/semaines maintenant, se poursuivent et même s’intensifient, avec un 5ème épisode exceptionnel en 2 mois, pour mardi et mercredi prochain.…
Jeudi 19 juin : un moratoire sur le solaire ét léolien a été voté
Avec pour conséquence, si il allait au bout du processus : l’interdiction immédiate de tout nouveau projet solaire ou éolien, de toute demande de permis ou de raccordement déposée.
Cette décision a peu de chances d’être appliquée, mais elle sème le doute et la pagaille auprès de toutes les (jeunes) entreprises engagées dans les énergies renouvelables (ENR). Et, comme enLes débats ont été virulents sur ces sujets cette semaine parfois, avec l’opposition récurrente ENR/nucléaire. Et c’est bien dommage, car je pense pour ma part que nous aurons rapidement bien besoin des deux, si l’on veut conserver et développer une énergie décarbonée et pas trop chère dans les prochaines décennies.
La pluspart des experts du domaine de l’énergie prévoient le plateau de production de pétrole vers 2030, c’est-à-dire demain!! Et que va-t-il se passer, sachant que nous sommes dépendant à plus de 98% des importations ? Les pays producteurs vont vouloir se le garder pour eux, ou le vendre à prix d’or (la fameuse li de l’offre et de la demande)… Là aussi, anticiper est une nécessité !
👀L’inspiration de la semaine
“Les défis du renouvellement des générations en agriculture”. C’est le suje du nouveau podcast Récits d'Avenir, avec une analyse du contexte et un point de vue croisé de jeunes agriculteurs et d’experts du sujet :
Camille et Julien Rispal, arboriculteurs de la Vallée du Rhône, troisième génération
Jean-Philippe Banc, jeune agriculteur, en succession familiale, impliqué sur le sujet de l’installation en agriculture
Cécile Gazo, ingénieure agronome de l’Agro Toulouse et docteure en sociologie, auteure d’une thèse de doctorat sous la direction de François Purseigle, intitulée : « Qui pour gouverner l’installation en agriculture ? »
Yves Le Morvan, responsable filières et marchés au sein du think tank de l’entreprise agricole, Agridées.
À découvrir ici par exemple.
👢Dans mes bottes
🔊 Une conférence que je donnerai ce jeudi 26 sur “la gestion des risques en élevage bovins viande et les défis à relever” lors de la journée portes ouvertes viande bovine en Sarthe (méga stress !!)
📊 Des comptes-rendus de visite
🐮 Un 1er rdv à préparer pour la semaine prochaine
Merci de m’avoir lue !
Si ça vous a plus, n’hésitez pas à liker, commenter, partager, et même me répondre, ça me fait toujours plaisir 😀
Bonne semaine encore sous le signe des fortes clauers, et à lundi prochain 🤓
Amandine